Agriculture et territoire : un destin commun ? (38)
« La question agricole n’a peut-être jamais été autant stratégique qu’aujourd’hui. L’actualité de ces derniers mois nous l’a rappelé avec force. Une partie de la planète a encore faim et la population mondiale croît encore.
Il devient urgent de préserver nos ressources mêmes renouvelables telles l’eau douce dont les prélèvements dépassent les retours naturels et l’utilisation des terres arables parfois dégradées par une exploitation intempestive ou des affectations qui les soustraient à la production. Les énergies fossiles s’épuisent et deviennent chères et il faut développer rapidement des alternatives. L’agriculture est au carrefour de tous ces enjeux : alimentaires, environnementaux, énergétiques. Les défis sont immenses mais sans doute pas insurmontables.
Pourtant, l’avenir de l’activité agricole n’a jamais été aussi incertain. Les prix de certaines matières premières ont certes augmenté ces derniers mois de façon spectaculaire, mais ils n’ont sans doute jamais été si volatiles. Si certains secteurs peuvent ponctuellement en bénéficier, d’autres en subissent déjà les contrecoups et globalement, l’évolution chaotique des prix déstabilise toutes les agricultures dont les équilibres économiques s’inscrivent structurellement sur le moyen et le long terme. Parallèlement, les politiques de régulation tendent à s’effacer, amortissant d’autant moins les effets pervers d’un marché devenu mondial. En Europe, la réforme de la PAC prévue
à l’horizon 2013 laisse présager notamment un recul du premier pilier au profit du second dans un jeu de vases communicants mal défini.
Face à ces défis agricoles qui nous concernent tous et en ce début de présidence française de l’Union européenne, au moment même du bilan de Santé de la PAC, nous avons souhaité nous engager dans ces débats en soulignant combien une approche davantage territorialisée de l’agriculture pouvait être un levier pour répondre aux enjeux d’aujourd’hui et de demain.
Cette lettre apporte quelques premiers éclairages :
Christiane LAMBERT, vice-présidente de la FNSEA, montrera d’abord combien la vitalité de nos campagnes attractives demeure intimement liée au développement agricole et qu’il convient donc de soutenir ces dynamiques complémentaires.
Gilles LEMAIRE, chercheur à l’INRA et président du conseil scientifique de FARRE, montrera ensuite tout l’intérêt d’une agronomie davantage territorialisée.
Frédérique ROSE, du réseau TRAME, soulignera enfin combien les agriculteurs s’impliquent et innovent déjà dans leurs territoires en dépassant certaines de leurs problématiques.
Nous poursuivrons à l’automne cette réflexion en l’élargissant à l’échelle mondiale. Au cours de nos assises, nous débattrons ainsi de l’intérêt d’un futur agricole davantage territorialisé avec des agriculteurs français et étrangers, des agronomes et des personnalités engagées.
Je vous souhaite donc une bonne rentrée et vous attends, le 9 octobre prochain, à nos traditionnelles assises d’automne. »
Michel LEDRU, président de Sol et Civilisation