Crise du vivant et stratégies de prise en charge de la qualité commune
2000
Dans son éditorial, l’auteur s’inquiète de la montée des crises du vivant qui annoncent un défi majeur pour nos sociétés : élaborer des stratégies communes pour prendre charge la qualité du vivant par et avec l’ensemble des acteurs concernés, agriculteurs bien sûr, mais aussi acteurs de filière, consommateurs etc.
Une fois encore, les gros titres des journaux se font l’écho de notre incapacité à gérer le vivant de manière satisfaisante : vache folle, listériose, marée noire, qualité de l’eau, etc. J’ai noté deux types de réactions : d’une part, la volonté d’améliorer la connaissance scientifique des phénomènes en jeu, ce qui me semble tout à fait légitime bien qu’insuffisant et, d’autre part, la recherche d’un bouc-émissaire à qui on appliquerait des normes de plus en plus drastiques.
L’agriculteur, gestionnaire du vivant que je suis, sait bien que les choses ne sont malheureusement pas aussi simples. Il est clair qu’abaisser le taux de listéria acceptable dans un pot de rillettes ne suffira pas à prévenir les décès dus à la listériose. Il faut bien sûr que des normes de qualité s’appliquent à l’éleveur, à l’abatteur, au producteur de rillettes, au transporteur, au commerçant, au fabricant de réfrigérateurs. Mais il faut aussi que le consommateur ne rompe pas la chaîne du froid et nettoie son frigo régulièrement. Il faut que chacun des acteurs de la filière assume ses responsabilités. Complexe !
Par ailleurs, le maître mot dans ce type de crise est la confiance. Pour recréer de la confiance, l’interdiction, le répressif ne suffisent pas. Tous les acteurs concernés doivent s’accorder sur une stratégie de qualité commune, prise en charge par chacun. C’est là que cela devient réellement compliqué, car il ne s’agit pas que de technique, mais d’humain. Mettre en œuvre de telles stratégies appelle des comportements nouveaux qui doivent s’inscrire dans le temps et des méthodes nouvelles.
Sol et Civilisation s’attache depuis deux ans à caractériser et à promouvoir ces démarches et ces méthodes. Pour cela, elle réunit régulièrement des acteurs de divers secteurs d’activités, concernés par ce type de problèmes liés au vivant. Ce numéro 15 de la Lettre se fait l’écho d’une de ces journées de travail. Qu’il s’agisse de la gestion d’un territoire comme la Chartreuse, de grandes entreprises ou de la filière bois, des démarches nouvelles émergent. Elles méritent d’être mises en lumière car elles sont, à mon sens, porteuses d’espoir. Elles nous permettront de gérer des crises de gestion du vivant, qui ne vont pas manquer de se multiplier, témoin la pollution au cyanure du Danube !