Le projet socio-politique du développement durable
2001
Après un bref retour sur l’apparition de la notion de développement durable, symptôme de l’émergence de la complexité du vivant, l’auteur propose quatre leviers pour considérer la gestion du vivant en bonne santé : une exigence de qualité totale, des modalités de prise en charge revisitées, le besoin de piloter la qualité, la nécessité de sécuriser les acteurs dans la prise d’initiative. En conclusion, le développement durable est un choix politique de société.
Je me souviens d’un […] philosophe [qui] nous disait qu’il y a des faits prospectifs, des signaux faibles que certains savent voir. A propos des signaux faibles, Chardin a écrit à son ami Huxley […] « je suis aussi pessimiste que vous pour 4 raisons » :
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D’abord parce que pour maîtriser le vivant et l’homme, il faut agir sur toute l’humanité, or l’humanité est en train de devenir une. Nous sommes en 1951, et je me demande comment quelqu’un pourra prendre le pouvoir sur cette entité qui est en train de se construire.
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Le deuxième point, je crois que vous faites erreur, ce ne sont pas les caractères exceptionnels qui poseront problème demain, ce sera la prise en charge des constantes de la base du vivant. Donc, ce n’est pas l’exceptionnel, c’est le quotidien qui va poser problème.
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Ensuite troisième point, un système dans lequel il n’y a plus d’individus […] engendre cette société hautement complexe où chaque acteur va se trouver confronté aux conséquences de ces choix qui seront sans commune mesure avec les causes initiales. Cela veut dire que dans cette société hautement complexe, un acteur, un individu peut générer des phénomènes extraordinairement importants, des impacts non prévisibles. Je crois qu’il n’y a pas besoin de faire de dessin !
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Et enfin, dernier point, la vision que nous avons de ce qui est important c’est le struggle for life de Darwin, soit c’est le plus fort qui gagne ! Dans cette société hautement complexe, ce sera le plus apte à l’action complexe qui gagnera !
C’est ce qui m’a inspiré dans mon chemin et c’est pour cela que j’ai fait de la biologie. Quand j’ai fait de la biologie, j’ai vu que personne ne posait de questions politiques, alors j’ai fait des sciences politiques et de l’économie et là personne ne se posait de questions du vivant. C’est donc par accident que je me suis retrouvé au Ministère de l’Agriculture pour traiter un problème qui m’était strictement personnel : la gestion du vivant en bonne santé. Beaucoup s’occupent du vivant malade et personne du vivant en bonne santé et encore plus au niveau de l’humanité ! J’ai progressivement été amené à voir qu’un énorme problème se posait, et c’est de cette question dont je vais vous parler. Je vais vous en parler autour de la notion de développement durable.